LE CDI EST LE CONTRAT DE TRAVAIL DANS PRES DE 9 CAS SUR 10.
La position du Contrat de travail à Durée Indéterminée (CDI) est très largement dominante ; ce contrat régit l’essentiel des relations de travail entre un employeur et un salarié. 86,6% des salariés du secteur privé disposent d’un CDI.
Les CDD, Contrat de Travail Temporaire (CTT) et contrats aidés ne représentent que moins de 14% des contrats de travail.
Une croissance du nombre de recrutement en CDD, a été enregistrée ces derniers trimestres (84% des embauches en CDD). Mais, paradoxalement, dans la mesure où la durée moyenne des CDD a fortement diminuée cette augmentation n’a pas fait évoluer la proportion entre le nombre de CDI et celui de CDD.
La diminution du nombre de recrutements en CDI pose problème en particulier aux jeunes entrants sur le marché du travail dont le parcours passe plus fréquemment encore par des contrats cours successifs en attendant l’accès à un CDI. Le fait pour un salarié de bénéficier d’un CDI est une assurance de stabilité dans l’emploi[1], puisqu’il ne prévoit pas de date de fin de contrat. Mais, dans la pratique, des CDI peuvent être rompus, par une démission, une fin de période d’essai, un licenciement ou une rupture conventionnelle. Ce dernier mode de rupture a d’ailleurs connu un fort développement depuis sa mise en place.
LA RUPTURE DU CDI EST FRÉQUENTE DURANT LA PREMIÈRE ANNÉE DU CONTRAT
La probabilité de rupture d’un CDI diminue avec la croissance de son ancienneté[2]. Aussi, c’est parmi les CDI signés, depuis moins d’une année que l’on relève un taux de rupture important. Les risques de démission, de licenciement ou de rupture conventionnelle sont plus faibles au-delà d’un an. Dans l’année qui suit leur signature, 36,1 % des CDI, conclus en 2011, ont été rompus. Ceci représente une hausse de 2,5 points entre 2007 et 2011[3] avec, d’un côté, une hausse de la proportion des ruptures de période d’essai et, de l’autre, une diminution de celle des démissions. Dans un contexte conjoncturel difficile à partir de mi-2008, il est probable que des salariés ont évité de quitter un CDI faute de perspective.
Les motifs de rupture sont divers.
La démission du salarié est le cas le plus fréquent (16,1%) ; elle s’explique par le fait que soit le salarié a trouvé une autre opportunité (piste parallèle suivie lors de sa recherche d’emploi) ou que l’emploi ne lui convient pas.
La fin de période d’essai décidée par l’employeur intervient dans 12,7% des cas (c’est-à-dire dans environ un contrat sur 8) et ne donne lieu, par principe, à aucune justification ; même si cette fin de période d’essai a bien évidemment un motif implicite telle une insatisfaction vis-à-vis du travail ou du comportement du salarié ou un carnet de commandes en baisse.
Les licenciements (3,3%) et les licenciements économiques (0,4%) interviennent à l’initiative de l’employeur. La part des ruptures transactionnelles, provenant d’un accord entre salarié et employeur, reste faible (1,7% des cas)
Les ruptures de CDI proviennent :
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dans près de la moitié des cas du salarié : démission (45% des cas de rupture) ou rupture transactionnelle (5%).
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Pour l’autre moitié, de l’employeur : fin de période d’essai (35%) ou licenciement.
La proportion de ruptures du CDI pendant la première année dépend fortement du secteur professionnel et du profil des salariés.
La probabilité qu’un CDI soit rompu avant son premier anniversaire est très variable d’un secteur professionnel à l’autre. Elle culmine à 58,6% de rupture dans le secteur de l’hébergement et de la restauration. Elle varie aussi selon l’âge des salariés : elle est plus fréquente chez les jeunes (de 15 à 24 ans), avec 45,6 % de rupture dans la première année, que pour les plus âgés. Elle est différente selon les qualifications : ainsi la majorité des CDI des employés peu qualifiés sont rompus en moins d’un an.
LE SYSTÈME ACTUEL EST EN FAIT ASSEZ SOUPLE
Ces chiffres et le choix des solutions adoptées prouvent que le CDI est géré de manière assez souple par les signataires des contrats. Même sans aucune réforme, il fonctionne bien avec une gestion correcte des RH puisque le CDI tend à se solidifier naturellement avec le temps, comme le prouve la diminution du taux de rupture du contrat avec son ancienneté. Cette tendance générale est valable pour les entreprises qui poursuivent leurs activités. Dans le cas de plans sociaux et/ou de fermeture d’entreprise, les diminutions ou ces fins d’activités ne sont pas liées à la nature des contrats de travail.
Les contraintes portant aujourd’hui davantage sur les CDD (modulation des cotisations chômage des CDD de moins de trois mois, choix des motifs du CDD, risque permanent de requalification en CDI, etc.) encouragent le recours au CDI plus simple et facile à interrompre.
Par rapport à un faisceau de contraintes imposé par le Code du travail, le marché de l’emploi tend naturellement, comme par le passé, à s’adapter. Les responsables avertis peuvent y parvenir, mais cela suppose une veille attentive des évolutions des règles du jeu et complique la gestion du personnel. Mais, par ailleurs, on ne peut pas ignorer l’incompréhension de nombre d’employeurs face aux jeux du droit du travail. C’est pour eux qu’une présentation simplifiée du Code du travail[4] parait opportune.
LE CONTRAT DE TRAVAIL UNIQUE EXISTE DÉJÀ
Ces éléments concrets d’information démontrent que le contrat « presque unique » existe déjà : il s’agit du CDI dont la domination demeure. L’idée évoquée ces derniers temps d’un « contrat de travail unique »[5] reviendrait en fait à vouloir rendre le modèle du CDD dominant en effaçant le CDI.
Je pense que ce nouveau « contrat unique » représente une fausse solution pour les employeurs (en encourageant la volatilité des salariés, etc.) comme pour les salariés (vivant dans une incertitude permanente, etc.) dont ma mise en place poserait de gros problèmes face à la réalité du terrain, en particulier pour les entrants sur le marché du travail.
[1] « Le CDI peut être rompu sur décision unilatérale soit de l’employeur (licenciement pour motif personnel ou pour motif économique, mise à la retraite, fin de période d’essai), soit du salarié (démission, départ à la retraite, fin de période d’essai), ou encore pour une cause extérieure aux parties ayant pour effet de rendre impossible la poursuite dudit contrat (cas de force majeure). Sa rupture peut aussi résulter d’un accord des deux parties élaboré dans le cadre du dispositif de « rupture conventionnelle » ».
[2] « Le risque de rupture d’un nouveau CDI est particulièrement élevé au cours des trois premiers mois : 10 % des CDI conclus en 2011 ont duré moins d’un mois et 19,6 % moins de trois mois.
[3] Source : DARES Analyse – janvier 2015 • N° 005
[4] Une version accessible du Code du travail en moins de 100 pages (avec une version en ligne dont les éléments existent déjà par ailleurs) pourrait être établie, sans remplacer la version complète pour les cas précis et conflictuels.
[5] Cette idée de « contrat unique » a bien été reprise par notre réxcent prix Nobel d’économie (même si l’idée n’est pas de lui), mais nous ne sommes pas sur ce sujet dans le domaine de la théorie économique, où il excelle sans doute, mais dans la pratique de terrain…
2 commentaires to “Dans près de 9 cas sur 10, le contrat de travail est un CDI.”
27 janvier 2015
Le contrat, presque unique, existe déj&a...[…] “La position du CDI dans le secteur privé est très largement dominante (86,6%) ; ce contrat régit l’essentiel des relations de travail entre employeur et salarié” […]
2 février 2015
thierryBonjour Daniel Lamar,
« Une version accessible du Code du travail en moins de 100 pages […] et conflictuels. »
Ah bon, ils savent lire ces employeurs qui s’assoient de façon ostensibles sur les plus élémentaires règles contractuelles?
Plus sérieusement, toutes les branches professionnelles ont des représentants: les syndicats pour les salariés (je ne tenterai même pas d’aborder ici la question de la représentativité en entreprise), les chambres patronales pour les employeurs.
Dans les deux cas, à question posée, on peut s’attendre à avoir une réponse argumentée et non-extraite du contexte, puisque ces représentants connaissent nécessairement leur environnement professionnel.Et si on faisait un peu vivre ces institutions?
Merci pour votre réflexion au sujet du contrat unique, je partage votre avis, et en poussant plus loin le raisonnement, je dirais que ce sont les cdd qu’il faudrait arrêter purement et simplement, je sais c’est pas gagné^^
cdlt
T.R.