AUCUNE ANNONCE SIGNIFICATIVE POUR L’EMPLOI DANS LES QUARTIERS PRIORITAIRES
Les annonces du Président de la République concernant la politique de la ville, faites à Tourcoing le 14 novembre, n’apparaissent pas avoir une grande consistance d’une manière générale et, en particulier, en ce qui concerne l’emploi.
La mise en scène des visites, comme la bonne qualité de la langue des discours[1], n’y change rien, les affirmations de principes non plus, quand les décisions politiques ne sont pas au rendez-vous. Les décisions de l’exécutif pour la politique de la ville, depuis juin, ont consisté en une baisse du budget pour 2017, une diminution des APL pour les habitants, la mise en cause de l’équilibre budgétaire des bailleurs sociaux et de leur capacité d’entretien des logements, la forte diminution du nombre d’emplois aidés…
La principale mesure annoncée pour les banlieues est l’expérimentation d’une nouvelle formule des « emplois francs » à partir de 2018[2] ne concerne qu’une dizaine de territoires[3] sur plus de 1 500 quartiers prioritaires[4]. Une éventuelle généralisation attendrait en 2020, après deux ans de test, si le budget est alors disponible dans le PLF 2020.
Dans leur formule de 2018, les « emplois francs » apporteraient aux employeurs une prime un peu plus élevée [5] et seraient ouverts à tous les demandeurs d’emploi, sur les 10 territoires ciblés, sans critère d’âge ou de diplôme. Les bénéficiaires seraient juste quelques milliers.
Par rapport aux enjeux des quartiers prioritaires actuels, ces dernières années, pour les élus, comme pour les professionnels de la politique de la ville, une annonce aussi limitée, voire marginale, constitue une forte déception. Elle intervient pour donner suite à la suppression de nombreux emplois aidés qui étaient réservés aux jeunes des quartiers.
Nota : Pour la mobilité des jeunes, le chef de l’État a évoqué un « plan national pour le permis de conduire » qui imposerait aux collectivités locales de financer « le code et le permis pour tous les jeunes majeurs », vivant dans des quartiers prioritaires relevant de la politique de ville. Le détail d’un tel montage, et de son financement pratique, dans des communes souvent sinistrées, interroge élus et professionnels !
PAS DE POLITIQUE SPÉCIFIQUE POUR LES QUARTIERS
On devra maintenant attendre de connaitre le « plan de mobilisation générale« , dont la coordination a été confiée à Jean-Louis Borloo.
Dans l’immédiat, les décisions sont renvoyées à des consultations avec les élus et les acteurs, comme des dizaines de fois au cours de ces dernières décennies.
Mais, sur le principe, le chef de l’État a réaffirmé que, sous son quinquennat, il n’y aurait pas de nouveau « plan Marshall » pour les banlieues. Il se refuse à présenter « une politique spécifique » pour les quartiers. S’il a affirmé que « personne ne perdra, dans les communes concernées par la politique de la ville, le moindre crédit sur 2018 » (suite à la baisse de la taxe d’habitation, ressource des communes), il n’a fait que confirmer que les crédits de la politique de la ville seraient sanctuarisés durant le quinquennat.
Tout laisse penser que l’exécutif se trouve, en fait, manquer à ce jour de propositions et de toute perspective concrète, il compte simplement sur une reprise économique globale qui apporterait une amélioration de la situation de l’emploi aux habitants des quartiers.
Les experts de la politique de la ville se demandent pourquoi ne pas se servir de ce qui a été dit, et redit, à de multiples reprises en partant de constats, qui ont déjà été faits. L’un de ces constats est qu’il est nécessaire de mobiliser des moyens spécifiques, ce qui ne semble pas être dans l’air du temps…
[1] Le discours : Le président de la République a déclaré : « C’est une mobilisation de toute la nation, qui seule peut répondre au défi immense » de la politique de la ville. (…) « Cette mobilisation nationale pour les villes et pour les quartiers, elle doit être celle du gouvernement, des collectivités territoriales, des associations, des entreprises, des intellectuels« . Il a promis : « un plan de bataille clair, avec une mobilisation pleine et entière« .
[2] Amendement au PLF 2018.
[3] Ont été évoqué à ce stade, comme quartiers d’expérimentation : quatre établissements publics de la Seine-Saint-Denis, les agglomérations d’Angers, de Cergy-Pontoise, de Sarcelles – Villiers-le-Bel, les métropoles marseillaise et lilloise, Grigny et Évry.
[4] Rappelons que 3 000 quartiers environ ont perdu ces dernières années la qualité de « quartiers prioritaires » pour des raisons purement budgétaires, afin de concentrer les moyens budgétaires, en constante diminution, sur 1 500 d’entre eux (mesure mise en place par Mme Najat Vallaud-Belkacem). De nombreux quartiers populaires ne font plus partie de la politique de la ville en dépit des besoins qui existent.
[5] Toute entreprise embauchant un habitant de ces quartiers (avec quel justificatif ?) bénéficierait alors d’une prime de l’État de 15 000 euros sur trois ans (3 fois 5 000 €) pour un CDI et pour un CDD de plus de six mois de 5 000 euros sur deux ans (2 fois 2 500 €).
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