Le taux de chômage est supérieur à 9% et près de 6 millions de personnes[1] se trouvent en recherche active d’emploi. Un grand nombre d’emplois aidés ont été supprimés durant l’année 2018, donc, les effectifs salariés du privé n’ont augmenté que de +106 100 (+0,5%) et le secteur privé totalise 19 403 900 salariés.
DANS UN CONTEXTE DE CHÔMAGE DE MASSE, LE MARCHÉ DU TRAVAIL ÉVOLUE SUR PLUSIEURS CRÉNEAUX.
Le marché du travail, pour répondre à la demande des employeurs, évolue nettement sur plusieurs créneaux.
- Les effectifs en contrats de travail temporaires ont augmenté ; l’intérim se trouve au plus haut de son développement[2], même si la fin d’année a été en recul.
-
Les effectifs de travailleurs détachés, venant des pays de l’Union européenne, déclarés ou non, augmentent.
-
Le nombre de créations de microentreprises a fortement augmenté de +28% en 2018[3]. Le recours à des indépendants[4] pour la réalisation de prestations remplace l’embauche de salariés, entre autres pour les plateformes numériques. C’est par exemple le cas dans le secteur des transports où la création de microentreprises augmente de +68%, correspondant pour l’essentiel à des emplois de chauffeurs (VTC ou autres fonctions) et de livreurs.
-
Les « contrats courts et répétés » ont continué à se développer en 2018, c’est la situation de « permittence » durant laquelle alternent période d’emploi et temps de chômage indemnisé.
-
Une proportion significative de salariés en contrat de travail à temps partiel inférieur à un mi-temps: 778 000 salariés avaient des contrats de moins de 78h à fin 2018.
En sus des points précédents, le recours au travail illégal demeure fréquent (avec des contrats ou des heures de travail, non déclarées). En particulier, il concerne les travailleurs étrangers en situation irrégulière[5], non déclarés[6], qui travaillent dans une « zone grise ». Mais aussi les emplois des services à la personne et la garde des enfants
FACE À CES ÉVOLUTIONS, LE MINISTÈRE DU TRAVAIL CHERCHE À ACCOMPAGNER CES ÉVOLUTIONS SANS Y METTRE DE FREIN
L’acceptation politique, par le ministère du Travail, du ces évolutions du monde du travail, se traduit très concrètement par la recherche de solutions concrètes pour accompagner le marché.
Cette politique traduit l’acceptation durable du chômage de masse en France, sans grand espoir d’y apporter un remède.
Pour les indépendants, la décision de doubler les plafonds de chiffres d’affaires en 2018 pour les microentreprises a encouragé leur création, même si ce chiffre est très rarement atteint[7]. Les statistiques confirment, dans la très grande majorité des cas, que le volume des activités réalisées sous ce statut reste faible. Le projet du ministère visant à faire bénéficier des indépendants défaillants d’une indemnisation chômage reste encore à concrétiser.
Des réflexions sont en cours pour améliorer le statut des indépendants travaillant pour des plateformes numériques (comportant demain une possible limitation théorique du temps de travail, des obligations de formation, un projet de fonds social professionnel, etc.). La piste d’une requalification en contrat de travail ouverte par la jurisprudence ne semble pas devoir être saisie.
Pour les travailleurs détachés, un aménagement des règles relatives aux travailleurs détachés déclarés est engagé (Application de la Directive européenne de 2018), mais il n’apporte pas de remède aux diverses fraudes existantes et au déficit de recherche, de contrôle et de sanction des travailleurs étrangers non déclarés, comme vient de la détailler la Cour des comptes.
Les bénéficiaires de « contrats courts » vont connaitre, très probablement, une augmentation des cotisations patronales dès 2019. Cela a été annoncé par le Président de la République comme par la ministre, officiellement pour compenser leur cout élevé en termes d’indemnisation chômage.
Un tel dispositif spécifique, un peu semblable, a déjà été mis en place pour les « intermittents du spectacle ».
L’AUGMENTATION DU RECOURS À L’INTÉRIM, AUX TRAVAILLEURS DÉTACHÉS, AUX « CONTRATS COURTS » OU AUX INDÉPENDANTS N’APPARAIT PAS DÉBOUCHER SUR DES RÉSULTATS SATISFAISANTS
D’un côté, on trouve une population de salariés en CDI (ou de fonctionnaires titulaires), entouré d’un petit nuage de CDD (ou de contractuels), en attente d’intégration dans un emploi stable.
De l’autre, des formes de travail précaires se développent. La politique publique actuelle vise juste à tenter de les encadrer « au mieux », plutôt qu’à freiner ces évolutions rapides en encourageant les contrats stables (CDI et CDD de plus de 6 mois).
A ce jour, l’augmentation du recours à l’intérim, aux travailleurs détachés, aux « contrats courts » ou aux indépendants n’apparait pas déboucher sur des résultats satisfaisants en terme quantitatif, sans même évoquer le volet qualitatif.
Le contexte actuel marqué par une perspective de croissance faible (1,3%), combinée aux tensions civiques et sociales existantes, dans à un contexte international unanimement pessimiste[8] n’apparait pas porteurs pour l’emploi en ce début d’année 2019.
L’ambition d’un marché du travail, à caractère universel en France, semble avoir été abandonnée par l’exécutif…
[1] Nombre de demandeurs d’emploi tenus à une recherche en France au quatrième trimestre 2018 (Chiffres DARES).
Catégorie A | Catégorie B | Catégorie C | Catégories A, B, C | |
T4-18 | 3 676 500 | 772 200 | 1 467 000 | 5 915 700 |
A : demandeurs d’emploi tenus de rechercher un emploi, sans emploi
B : demandeurs d’emploi tenus de rechercher un emploi, ayant exercé une activité réduite courte (de 78 heures ou moins sur un mois)
C : demandeurs d’emploi tenus de rechercher un emploi, ayant exercé une activité réduite longue (de plus de 78 heures sur un mois
[2] Dans les développements positifs, il convient de noter la croissance du nombre de CDII qui a dépassé le seuil des 50 000 et qui apparait comme une bonne solution.
[3] En 2018, les créations d’entreprises atteignent un nouveau record : 691 000 entreprises ont été créées en France, soit 17 % de plus qu’en 2017. Les immatriculations de micro-entrepreneurs sont particulièrement dynamiques (+ 28 %). Les créations d’entreprises individuelles classiques (+ 20 %). Les créations de sociétés augmentent beaucoup plus modérément (+ 2 %). – Source : Insee, répertoire des entreprises et des établissements (Sirene).
[4] Une grande majorité des indépendants travaillent sur des emplois freelances de courtes durées. La vente de prestations remplace le contrat de travail.
[5] Par suite d’un refus de leur demande d’asile ou après le dépassement du terme de permis de séjour.
[6] Il arrive parfois que des travailleurs étrangers, en situation irrégulière, soient déclarés par leur employeur.
[7] Une activité de micro-entrepreneur peut être exercée parallèlement à d’autres statuts ou activités : salarié en CDI ou CDD ; demandeur d’emploi, avec maintien partiel des allocations chômage, dans le cadre du dispositif de reprise d’activité réduite ; retraité, qui perçoit une pension de retraite ; invalide de 1e catégorie, sous certaines conditions ; étudiant et personne en formation initiale ; fonctionnaire, sous réserve de l’autorisation expresse de son administration ; exploitant agricole non salarié. https://www.service-public.fr/professionnels-entreprises/vosdroits/F23264
[8] Les prévisions européennes et internationales en ce début 2019 convergent toutes sur un recul de la croissance et des échanges.
Pas de commentaire sur “Quelles évolutions de l’emploi dans le cadre du chômage de masse ?”