LA NOTION DE DÉCROCHAGE MÉRITE D’ÊTRE PRÉCISÉE
Le terme de « décrochage scolaire »[1] s’est imposé en France, depuis la fin des années 2000, pour désigner les sorties prématurées du système éducatif dans le secondaire (collège et lycée) et dans l’enseignement supérieur. En regard, la lutte contre le décrochage scolaire vise l’obtention du diplôme préparé et consacre d’achèvement d’une scolarité normale.
Le « décrochage » correspond à l’abandon des études sans diplôme ni perspective. Le terme recouvre l’échec scolaire et la rupture avec le système (abandon sans échec concrétisé).
Un jeune qui abandonne ses études pour concrétiser un projet personnel (par exemple : voyager, faire de musique, travailler, etc.) n’est pas un décrocheur.
La question de la catégorisation des décrocheurs, par les administrations, donne parfois lieu à débats.
Seuls sont considérés comme décrocheurs les élèves sortis « sans solution donc : « sans certification et sans orientation vers une formation », ils entrent dans la catégorie des NEET : « jeune ni en emploi ni en formation ».
PLUSIEURS TYPES DE DÉCROCHAGE SCOLAIRE APPARAISSENT.
Le Centre d’études et de recherches sur les métiers et les qualifications (Céreq) publie les conclusions d’une enquête[2] sur le décrochage des jeunes en formation. Il compare la situation en lycées professionnels (LP) et en centres de formation d’apprentis (CFA) qui permet de différencier deux conceptions du décrochage, et d’identifier les leviers de prévention selon les voies de formation.
Dans l’enseignement secondaire professionnel, la question du décrochage est d’autant plus cruciale, dans la mesure où la majorité des décrocheurs sont issus des lycées professionnels et des centres de formation d’apprentis ont déjà rencontré des difficultés de parcours scolaire[3].
Ces parcours de formation de ces deux types d’établissements n’impliquent pas les mêmes formes de décrochage. La prévention du décrochage diffère.
« Entre les deux filières de la formation professionnelle initiale, les différences de statut – scolaire pour les élèves de LP, salarié pour les apprentis – conditionnent tant la conception du décrochage que l’action collective en matière de prévention. »
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En lycée professionnel, le décrochage est généralement à l’échec scolaire (échec au diplôme). Sa prévention privilégie la lutte contre l’absentéisme scolaire.
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En CFA, le décrochage correspond à la résiliation du contrat d’apprentissage, lorsqu’elle entraine l’arrêt du parcours de formation.
La durée de passage des jeunes en entreprise est différente, ce qui influe sur son importance[4] par rapport aux échecs.
La responsabilité à l’égard des jeunes est différente entre LP et CFA, compte tenu des différences de statut : lycéen ayant des stages ou apprentis sous contrat de travail (contrat d’apprentissage), mais il semble manquer dans les deux cas une personne responsable du parcours du jeune.
L’IDENTIFICATION DES CAUSES PERMET DE TRAVAILLER A LA PRÉVENTION DU DÉCROCHAGE.
Dans les CFA, les causes des résiliations de contrats sont liées :
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Soit à la qualité des relations entre apprentis et employeurs,
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Soit à la déception de l’apprenti par rapport au métier, c’est-à-dire « au décalage qui peut exister entre les conditions réelles du travail en entreprise et les représentations que s’en faisait le jeune a priori»,
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Soit à des problèmes de comportement d’apprentis, tels que : retards, absences, manque d’implication dans le travail, etc.
Les ruptures précoces sont fréquentes en période d’essai, même si elles peuvent intervenir à cause de la non validation du diplôme.
En lycée professionnel, les décrocheurs sont justes définis comme les élèves sortants sans diplôme. Des éléments de repérage et de prévention de l’échec scolaire sont pris en compte. Ils portent sur les absences, la discipline (sanctions et punitions), les ruptures de scolarité (abandons, exclusions par le conseil de discipline) et les réorientations en cours d’année.
IL RESTE A PROGRESSER DANS LE DOMAINE DES DÉMARCHES DE SUIVI INDIVIDUEL DES JEUNES POUR LIMITER LE NOMBRE DES DÉCROCHAGES SCOLAIRES
LA DÉSIGNATION DE PERSONNES RESPONSABLES APPARAIT INDISPENSABLE.
Les actions de prévention du décrochage existent dans les LP et les CFA, mais les acteurs ne sont pas les mêmes.
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Dans les lycées, elles sont prises en charge par les enseignants et les établissements.
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Dans les CFA, l’encadrement institutionnel de la prévention du « décrochage » relevait du conseil régional (et pas du rectorat) et « les équipes péri-enseignement sont réduites ».
Suite aux mesures de réformes de l’apprentissage[5] et de l’enseignement professionnel[6], des changements vont intervenir.
La responsabilité de l’apprentissage est maintenant du ressort des branches professionnelles[7] et des employeurs. Cela suppose « une plus grande implication des employeurs » au sein des CFA[8], qui reste à mettre en place.
En résumé, des efforts sont déployés sous plusieurs formes et avec des intensités diverses, mais il reste à progresser dans le domaine des démarches de suivi individuel des jeunes pour limiter le nombre des décrochages scolaires : personnes responsables et non commissions et accompagnement personnel éventuellement hors éducation nationale [9].
[1] Selon le Code de l’éducation (art. L313.7), sont considérés comme décrocheurs les « jeunes sortant sans un diplôme national ou un titre professionnel enregistré et classé au répertoire national des certifications professionnelles du système de formation initiale ».
[2] « Prévenir le décrochage : une comparaison entre lycées professionnels et CFA » – Christophe Guitton, Cathel Kornig, Eric Verdier – Céreq Bref n°380 – Août 2019
L’étude a notamment porté sur le CFA interprofessionnel des quartiers Nord de Marseille (450 apprentis), et sur le CFA Marseille (CFA de branche situé dans une technopole de la ville de Marseille, 139 apprentis).
[3] Ces formations « ont en commun de constituer des filières de remédiation pour nombre de collégiens en rupture avec la forme scolaire académique ».
[4] « Dans les LP, l’alternance occupe une place moindre dont témoigne la brièveté des périodes en entreprises (12 à 16 semaines sur deux ans pour les CAP et 22 semaines sur trois ans pour les bacs pro). »
Dans le CFA, le temps passé en entreprise, le plus souvent à raison de deux semaines de travail pour une semaine de cours, donne au travail une importance cruciale.
[5] Loi sur la liberté de choisir son avenir professionnel
[6] Loi pour une École de la confiance
[7] « Certaines branches montrent la voie en ce sens, d’autres en restent très éloignées. »
[8] Conseil d’administration et Conseil de perfectionnement.
[9] « En outre, l’idée d’un rapprochement des deux voies de formation au sein des lycées professionnels invite à faire en sorte que, quels que soient leurs statuts et leurs établissements, les jeunes bénéficient de services d’accompagnement répondant à des normes de qualité fondées sur un suivi individualisé. »
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