Depuis le 1er mars, le Contrat d’engagement jeunes (CEJ) se met progressivement en place.
Il faudra attendre plus d’un an pour juger du fonctionnement du dispositif et de l’efficacité de celui-ci : entrées, proportion des abandons et/ou sanctions, durée moyenne du CEJ, situation professionnelle des jeunes 6 mois après la sortie du CEJ.
LES POSITIONS CRITIQUES, EXPRIMÉES DES L’ORIGINE, SONT NOMBREUSES ET PORTENT SUR DES ASPECTS DIVERS.
Les demandes exprimées par le président de l’UNML, n’ont pas toutes été prises en compte, par exemple, les interrogations sur la place des opérateurs privés ou celle sur l’alignement entre mineurs et majeurs entrant en CEJ.
Les 32 recommandations et les 9 conditions de réussite, issue de la réflexion du Conseil d’orientation des politiques de jeunesse (COJ)[1], ne sont pas toutes prises en compte.
Les organisations syndicales des personnels concernés mettent en garde contre les risques encourus[2].
La secrétaire générale du Synami-CFDT[3] résume bien les questionnements actuels. Elle s’interroge sur le risque d’une concurrence de fait entre Les Missions locales et Pôle emploi sur le CEJ. Cette concurrence pourrait être déloyale.
« Ce système crée une situation de mise en concurrence entre les Missions locales et les agences Pôle emploi qui ne peut qu’être en défaveur des premières puisque l’allocation versée par les missions locales transitera par les agences régionales de paiement de l’État (ASP) dont on connaît la lenteur, alors que les jeunes signataires d’un contrat avec Pôle emploi seront directement rémunérés par Pôle emploi.
On aboutira donc à un système à deux vitesses en matière de suivi et de rémunération selon le prestataire avec qui le jeune engagé dans le dispositif signera son contrat. »
Le syndicat compare les savoir-faire de Pôle emploi et des Missions locales.
« Les missions locales font de l’accompagnement global des jeunes depuis une quarantaine d’années, là où Pôle emploi se concentre surtout sur l’accès à l’emploi. »
Les Missions locales peuvent être fragiles en matière de formation[4].
Les personnels de Pôle emploi vont devoir « acquérir le métier » :
« Les agents Pôle emploi, absolument pas spécialisés dans l’accompagnement de jeunes ne disposeront que de six jours de formation pour acquérir cette compétence. » – Synami-CFDT
Le financement des Missions locales, au titre du CEJ, reste encore incertain[5].
Il n’est plus le même que celui de la Garantie jeunes.
Le syndicat envisage que Pôle emploi puisse espérer remplacer, progressivement, les Missions locales auprès des jeunes.
Pôle emploi aurait envoyé des convocations à tous les jeunes inscrits éligibles au CEJ de son réseau « pour leur proposer d’entrer d’emblée dans le CEJ, sans tenir compte de leur situation ».
Certaines associations régionales des missions locales (ARML) auraient dû adresser des SMS pour prévenir les jeunes, visés, de prendre contact avec leur conseiller à leur Mission locale, avant de se rendre chez Pôle emploi.
Le Président de l’UNML a exprimé une « volonté très claire au niveau national entre l’UNML et Pôle emploi d’avoir une logique extrêmement partenariale et complémentaire ».
Tout reste encore à caler sur l’ensemble du territoire.
LE MINISTÈRE DU TRAVAIL PRÉPARE L’INTERVENTION D’ACTEURS PRIVES.
Si les principaux opérateurs du CEJ sont Pôle emploi et les Missions Locales avec respectivement 1 700 et 4 000 conseillers dédiés au dispositif, la loi prévoit que le dispositif peut « également être mis en œuvre par tout organisme public ou privé fournissant des services relatifs au placement, à l’insertion, à la formation, à l’accompagnement et au maintien dans l’emploi des personnes en recherche d’emploi ».
« Nous allons lancer dans le cadre du CEJ des co-accompagnements entre des associations de lutte contre la pauvreté et les Missions Locales ».
Dans un premier temps, le ministère a prévu de prolonger les conventions existantes, dans le programme « 100% inclusion » (PIC), avant de lancer de nouveaux appels à projet.
Le cahier des charges des futurs appels à projet régionaux « CEJ Jeunes en rupture » serait en gestation. Les associations lauréates pourraient co-signer le CEJ, avec les Missions Locales.
Cela reste à confirmer. L’interrogation actuelle porte sur la nature des bénéficiaires attendus et de leur mode de financement.
RAPPEL
Le décret du 18 février 2022 relatif au contrat d’engagement jeune[6] précise les modalités relatives au CEJ et à l’allocation ponctuelle pouvant être versée par les missions locales et par Pôle emploi.
Le texte est entré en vigueur le 1er mars 2022.
Il concerne des jeunes de seize à vingt-cinq ans révolus (et vingt-neuf ans révolus lorsque les jeunes sont reconnus travailleurs handicapés) confrontés à une difficulté d’accès à l’emploi durable pris en charge par les Missions locales, Pôle Emploi ou d’autres opérateurs publics ou privés.
L’allocation versée au titre du CEJ devrait être revalorisée au 1er janvier 2023.
[1] Avis du COJ – Les conditions de réussite du Contrat d’Engagement Jeune – https://www.jeunes.gouv.fr/IMG/pdf/avis_coj_-_contrat_d_engagement_jeune.pdf
[2] « Pour la CGT, le CEJ n’offre ainsi aucune perspective réelle pour la jeunesse. Le CEJ n’est qu’une nouvelle expression de la logique libérale du gouvernement : un contrat où la responsabilité des employeurs n’est à aucun moment engagée mais où les jeunes seront contraints d’accepter une formation ou un emploi sous peine de « sanctions ». »
[3] Isabelle Klem, secrétaire générale du Synami-CFDT, syndicat des métiers de l’insertion – http://synami-cfdt.fr/
[4] « On va donc demander aux missions locales de mettre en place des parcours de 15 à 20 heures comprenant des modules pédagogiques pour les jeunes alors que ce n’est pas notre métier ». Synami-CFDT.
[5] « Les missions locales devraient toucher en premier lieu une dotation-socle minimale complétée pour chaque jeune intégrant le dispositif. Ce n’est absolument pas sécurisant d’autant qu’on ne connaît pour l’instant pas la clé de répartition des ressources. » Synami-CFDT.
[6] Le décret est notamment pris pour l’application des articles L. 51315 à L. 5131-7 du code du travail, dans leur rédaction issue de l’article 208 de la loi n° 2021-1900 du 30 décembre 2021 de finances pour 2022.
Pas de commentaire sur “Comment vont s’entendre les différents acteurs du Contrat d’engagement jeunes (CEJ) ?”