LE PREMIER MINISTRE VIENT D’ANNONCER DES MESURES EXCEPTIONNELLES POUR LE DÉPARTEMENT DE LA SEINE SAINT-DENIS
Le Premier ministre vient d’annoncer 23 mesures « exceptionnelles » pour le département de la Seine Saint-Denis en réponse aux conclusions d’un rapport parlementaire le mai 2018 intitulé « La République en échec ».
La ministre du Travail était absente… La Seine Saint-Denis apparait comme le département le plus pauvre de France.
MAIS LE VOLET EMPLOI N’A PAS ÉTÉ ÉVOQUÉ LORS DE CES ANNONCES.
Or, les demandeurs d’emploi sont nombreux en Seine-Saint-Denis.
Au troisième trimestre 2019, on dénombrait environ 171 500 demandeurs d’emploi en catégorie A, B ou C[1] (dans le top 5 des départements à fort nombre de chômeurs). Mais surtout, aucune diminution du nombre des inscrits n’a été enregistrée sur l’année écoulée.
En Seine Saint-Denis, il existe un décalage structurel. Par exemple, la proportion des demandeurs d’emploi « non diplômés » est de près de 43% contre 35% en moyenne nationale. Ceci explique que lorsque des nouveaux emplois sont créés, ils ne sont pas forcément pourvus par les habitants du département.
Le taux de chômage dans le 93 était de 10,8% au second trimestre 2019[2], soit plus de 2 points au-dessus de la moyenne en France métropolitaine. En Ile de France, le taux de chômage est de 7,4%[3].
LES MESURES ANNONCÉES POUR LA SEINE SAINT-DENIS S’INSCRIVENT DANS LES POLITIQUES PRÉVUES PAR LE PLF 2020, OU ESPÉRÉES, POUR LES ANNÉES SUIVANTES.
Ces mesures ciblent essentiellement des moyens pour les fonctions publiques dans les domaines de :
- La sécurité, avec le recrutement de 50 policiers supplémentaires, à Saint-Ouen et La Courneuve[4]
- L’éducation, avec un prérecrutèrent d’enseignants via l’attribution de bourses à 500 étudiants par an, sous condition que ceux-ci s’engagent à exercer au moins trois ans dans leur département[5].
- La santé, avec la modernisation de trois services d’urgence[6].
- La justice, avec 35 postes de greffiers et 12 postes de magistrats.
- Enfin, cinq inspecteurs en charge du contrôle des logements indignes seraient recrutés.
Ces mesures sont très limitées en nombre de nouveaux postes.
Il a également annoncé des avantages particuliers pour les personnels :
- Une prime de fidélisation de 10 000 € pour les fonctionnaires restés 5 ans en poste dans le 9.3, pour diminuer le turn-over. Actuellement, par exemple, en moyenne les agents du ministère de l’Intérieur restent 2,7 années en Seine-Saint-Denis. Le but est de fidéliser les 39 000 fonctionnaires sur le département[7].
- Une priorité dans l’accès au logement des agents de l’État et une augmentation de leur niveau de prime pour être aligné sur celui des administrations centrales., etc.
Le Premier ministre a annoncé des investissements concernant divers locaux : rénovation de deux commissariats[8], agrandissement du TGI de Bobigny et un groupement hospitalier et de santé verra le jour, relogement de la Sous-Préfecture de Seine-Saint-Denis dans une ancienne succursale de la Banque de France et un budget supplémentaire pour l’immobilier scolaire[9].
Mais le calendrier de mise en œuvre de ces mesures reste flou et aucun budget supplémentaire n’a été précisé.
LA COMMUNICATION SUR LA MOBILISATION DES MOYENS SUR LE 93 APPARAIT PEU CONVAINCANTE.
Tant mieux si ces mesures sont effectivement mises en œuvre, mais force est de constater qu’elles ne répondent ni aux besoins ni à la situation sociale d’une grande part des communes de ce département[10].
La sécurité et l’emploi ne semblent pas faire l’objet d’un effort suffisant pour être porteuse d’espoir.
Les mesures localisées sont considérées, par certains observateurs, comme des annonces préélectorales privilégiant certaines communes, à quelques mois des municipales…
[1] Dares Indicateurs – 23/10/2019
[2] Dares – Taux de chômage localisés au 2ᵉ trimestre 2019 – Comparaisons régionales et départementales – 02/10/2019
[3] Taux de chômage au 2ᵉ trimestre 2019 par département en Ile de France (DARES)
75 | Paris | 6,4% |
77 | Seine-et-Marne | 6,9% |
78 | Yvelines | 6,4% |
91 | Essonne | 6,7% |
92 | Hauts-de-Seine | 6,5% |
93 | Seine-Saint-Denis | 10,8% |
94 | Val-de-Marne | 7,4% |
95 | Val-d’Oise | 8,6% |
Total Ile de France | 7,4% |
[4] Les 100 Officiers de Police Judiciaire (OPJ) annoncés d’ici à 2021, correspondent à des promotions internes de personnels en poste et non à des effectifs supplémentaires, a priori.
[5] Le recrutement des enseignants donne lieu chaque année à un concours spécifique pour l’Académie de Créteil, faute de parvenir à pourvoir les postes sur la base du concours national. On pourrait supposer que le niveau des admis puisse être inférieur à celui du concours national…
[6] Les urgences hospitalières de Montreuil, Montfermeil et Aulnay-sous-Bois seraient modernisées.
[7] Le taux de criminalité en Seine-Saint-Denis est le plus important de France métropolitaine. Il concentre 18% des faits de trafic et revente de stupéfiants commis en France. Les habitants du département éprouvent fréquemment un sentiment d’insécurité. Ce contexte joue sur la fréquence des souhaits de départs des fonctionnaires.
[8] Les commissariats d’Aulnay-sous-Bois et d’Épinay-sur-Seine seraient rénovés d’ici 2023, avec un budget prévisionnel de 30 millions d’euros. Le choix de ces deux villes peut interroger à l’approche des élections municipales.
[9] 20 millions d’euros seraient fléchés par la région pour financer des investissements immobiliers dans le cadre du dédoublement des classes de CP et CE1 en zone d’éducation prioritaire.
[10] Le plan Borloo de mai 2018, qui proposait une stratégie globale, a été rapidement enterré par Emmanuel Macron.
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