LE MINISTÈRE DU TRAVAIL AFFIRME AVOIR DÉJÀ ENREGISTRE 650 000 CONTRATS D’APPRENTISSAGE POUR L’ANNÉE 2021.
Le chiffre précis ne sera connu qu’en 2022, après un point définitif sur les données et on le souhaite une analyse des contrats signées (nature des opérateurs, niveau de diplôme visés, taux d’abandon des apprentis, etc.).
Le nombre des entrées en apprentissage a progressé en passant de 289 000 en 2016 à 368 000 en 2019 et à 525 600 en 2020.
Entre 2020 à 2021, la croissance du nombre de contrats d’apprentissage serait de +24%, donc importante.
LA COUR DES COMPTES CRITIQUE LES MOTIFS DE CE DÉVELOPPEMENT.
Dans une récente note, la Cour des Comptes[1] constate que pour arriver à ce résultat les dispositifs d’aide à l’apprentissage se sont multipliés[2] : développement de nouveaux acteurs, élargissement du champ et de l’âge (passage de l’âge limite de 25 à 29 ans), aides exceptionnelles jusqu’en juin 2022, etc.
Mais, parallèlement elle critique le fait que « la politique d’incitation au développement de l’apprentissage s’est faite d’une manière indifférenciée pendant la crise sanitaire : la prime à l’embauche exceptionnelle de 5 000 € à 8 000 € selon l’âge de l’apprenti, prolongée jusqu’au 30 juin 2022, a été attribuée sans considération du niveau de diplôme ».
Le développement de l’apprentissage a eu lieu :
« au prix d’un élargissement vers les niveaux de diplôme élevés. La part des diplômés de niveau bac+2 et plus est en effet passée de 35% en 2016 à 56% en 2020[3] ».
« Si la progression en 2021 concerne tous les niveaux de diplôme, elle est plus forte dans l’enseignement supérieur, et particulièrement pour les niveaux supérieurs au bac+3 (Master). » – Note CC.
La répartition des niveaux de diplômes visés par les contrats d’apprentissage en 2021 n’est pas encore connue.
La croissance de la proportion des jeunes titulaires d’un bac ces deux dernières années (84% d’une classe d’âge titulaire du bac 2021) doit être prise en compte pour apprécier la légitimité de cette évolution.
L’évolution récente renforce l’image de l’apprentissage comme une voie d’excellence.
Néanmoins, la nature du contrat diffère :
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Pour l’obtention d’un CAP par apprentissage, qui constitue souvent une étape dans un parcours personnel avec une suite potentielle des études, et
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Pour l’obtention d’un Master2, qui boucle a priori la fin d’un cursus.
CETTE CROISSANCE RESTE EN SUSPENS FAUTE D’UN FINANCEMENT DURABLE.
Le budget dédié ne tient pas compte de l’augmentation du nombre des apprentis.
Conséquence, l’État a dû apporter un budget supplémentaire à France Compétences pour 2021 (mais celui-ci reste insuffisant par ailleurs).
L’aide exceptionnelle aux contrats d’alternance doit prendre fin au 30 juin 2022 ; c’est-à-dire que le nombre des inscriptions, pour l’année 2022-2023, risque d’en subir le contrecoup.
La situation du financement des contrats d’apprentissage n’est pas stabilisée et durable.
L’OBJECTIF ANNUEL D’UN MILLION D’ENTRÉES DE JEUNES EN APPRENTISSAGE PARAIT ENCORE BIEN LOINTAIN.
Pour y parvenir, il faudrait :
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Engager une réforme des lycées professionnels pour promouvoir la voie de l’alternance de tous les lycéens pros,
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Transformer en contrat d’apprentissage des diplômes imposant 6 mois de stages,
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etc.
Ces questions nécessitent l’implication de l’Éducation nationale et des Enseignements Supérieurs, en partie pour le financement !
Par ailleurs, il serait opportun de relancer les contrats de professionnalisation dont le nombre a diminué de moitié.
[1] L’insertion des jeunes sur le marché du travail – Les enjeux structurels pour la France – Décembre 2021.
[2] Rapport CC – Une stratégie des finances publiques pour la sortie de crise de juin 2021
[3] « L’essentiel des nouvelles places créées a profité aux élèves capables de suivre un cursus long et a peu bénéficié aux publics vulnérables. Si ce choix peut être justifié pour développer l’apprentissage dans notre pays, il n’améliore qu’à la marge l’insertion sur le marché du travail des jeunes les plus diplômés, au demeurant déjà bonne. »
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