Chaque État membre reste souverain en matière de travail, d’emploi, de formation, de protection sociale comme d’aides sociales.
Mais des coordinations entre les États membres sont recherchées dans ces domaines[1].
Elles se traduisent par la mise en place d’objectifs communs, avec des Directives et l’accès à des moyens financiers[2] (FSE+ ou prêts).
Par exemple, au niveau de l’UE, cela a été logiquement le cas de la Directive sur les travailleurs détachés de 1996, dont la nouvelle version est entrée en vigueur le 30 juillet 2020[3].
DES ORIENTATIONS SOCIALES ONT ÉTÉ ADOPTÉES, MAIS ELLES NE S’IMPOSENT PAS AUX ÉTATS MEMBRES
Le « Socle européen des droits sociaux », adopté en 2017, liste 20 principes sociaux vers lesquels l’Europe doit tendre, mais il n’est pas contraignant pour les États membres[4].
Les principes sociaux portent sur « l’égalité des chances et accès au marché du travail », « des conditions de travail équitables” et « protection et inclusion sociales ».
En 2021, les Vingt-Sept pays, lors du sommet de Porto, ont fixé trois objectifs chiffrés à atteindre d’ici à 2030 :
- un emploi pour au moins 78% des 20-64 ans ;
- une participation à des activités de formation pour au moins 60% des adultes chaque année ;
- au minimum 15 millions de personnes menacées de pauvreté ou d’exclusion sociale en moins.
Ces priorités expliquent certains objectifs visés par le gouvernement en France, même si les chiffres en sont bien inférieurs…
DES DIRECTIVES RÉCENTES DANS LE DOMAINE DU TRAVAIL
Parmi les Directives récentes ont été adoptées par l’UE dans le domaine du travail, on peut citer:
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Une Directive sur les salaires minimums (2022), dont le but est de favoriser une convergence à la hausse des salaires minimums en Europe et de suivre les mesures mises en place par les Etats membres[5].
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Une Directive sur l’équilibre femmes-hommes dans les CA des entreprises cotées en bourse (2022)[6]. Les entreprises de moins de 250 salariés ne sont pas concernées par ce texte.
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Une Directive sur la transparence des salaires (2023) pour connaitre le rapport des rémunérations entre les femmes et les hommes[7].
En 2024, une directive est entrée en phase finale d’adoption[8] : la Directive sur les travailleurs des plateformes numériques.
Cette directive a pour objectif de permettre aux travailleurs des plateformes numériques d’accéder au statut de salarié, quand existe un fort lien de subordination avec la plateforme dont ils dépendent est établi.
Chaque pays a fixé ou fixera ses règles. Rien ne devrait donc évoluer en France ou le gouvernement à freiner l’adoption de cette directive et en a fait amender les règles.
LE FONDS SOCIAL EUROPÉEN (FSE)
Le traité de Rome (1957) a institué le Fonds social européen (FSE), qui est le fonds structurel le plus ancien de l’UE[9].
Il a été conçu initialement pour financer la reconversion des travailleurs et leurs mobilités entre Etats et élargi progressivement pour des programmes de formation en entreprise, d’aide pour les chercheurs d’emplois et les plus démunis ou encore de réinsertion de prisonniers, etc.
Pour la période 2021-2027, le Fonds social européen+ (FSE+) dispose d’un budget de 88 milliards d’euros[10].
Il permet de financer des projets de collectivités locales, d’associations, d’universités entreprises, etc. dans les pays de l’Union européenne.
En France, les fonds du FSE+ sont gérés à 35 % par les Régions et à 65 % par le ministère du Travail.
Nota : Ce billet ne traite pas de la gestion du FSE+ en France et des critiques qui ont pu lui être adressé.
SURE : UNE AIDE FINANCIÈRE TEMPORAIRE DE L’UE
En avril 2020, l’aide financière temporaire SURE (Support to mitigate Unemployment Risks in an Emergency ou aide à l’atténuation des risques de chômage en cas d’urgence) été créé par l’Union Européenne pour contribuer à la protection des emplois et des travailleurs lors de la crise sanitaire.
L’aide a pris la forme de prêts de l’UE mis à disposition des pays bénéficiaires à faibles taux (98,4 milliards d’euros).
Ces aides étaient destinées à financer la création ou l’extension de dispositifs de chômage partiel, y compris pour les travailleurs indépendants.
Les 19 États membres de l’UE, ayant demandé à bénéficier de ces prêts, ont reçu la totalité du montant demandé[11].
La France n’a pas eu recours à ce dispositif, pas plus que l’Allemagne ou les Pays-Bas.
Les principaux pays bénéficiaires de SURE ont été l’Italie (28%), l’Espagne (22%), la Pologne (11%), la Belgique (8%), la Grèce et le Portugal (6% chacun).
[1] Les pays membres de l’UE élaborent annuellement alors des Plans nationaux pour l’emploi (PNAE), (ou Programmes nationaux de réforme (PNR), qui précisent les mesures prises concernant l’emploi et la lutte contre le chômage.
[2] L’Acte unique européen (marché unique en 1986) acte une prise en compte des questions sociales. La lutte contre le chômage devient alors un objectif important de la Commission européenne, avec pour visée la cohésion économique et sociale.
Le traité d’Amsterdam (1997) a modifié la donne au niveau européen. L’emploi est dès lors perçu comme aussi important que les autres domaines de l’économie européenne. Le titre VI du traité d’Amsterdam est consacré à cette question.
[3] Adoptée après deux ans de négociations, la directive 2018/957 qui révise la première directive « Détachement » adoptée en 1996 entre en vigueur. Ces nouvelles dispositions vont permettre de créer des conditions de concurrence équitables et de renforcer la protection des travailleurs détachés. – https://travail-emploi.gouv.fr/archives/archives-presse/archives-communiques-de-presse/article/nouvelles-dispositions-en-matiere-de-detachement-de-travailleurs-quels
[4] Ce qui serait contraire aux traités européens.
[5] Mais il n’impose pas la mise en place d’un « smic » dans les cinq pays qui n’en disposent pas au niveau national (Danemark, Finlande, Suède, Autriche et Italie), car il est défini par branches professionnelles dans ces pays.
[6] Les Etats membres de l’Union disposent de deux ans pour transposer la directive dans leur droit national. Ils devraient tenus de mettre en place des sanctions dissuasives telles que des amendes pour s’assurer du respect des nouvelles règles.
[7] Les Etats membres devraient mettre en place, d’ici le 7 juin 2026, des dispositifs permettant une meilleure transparence et une meilleure communication des salaires, aussi bien pendant la phase de recrutement que pendant l’exécution du contrat de travail.
[8] Après un accord politique des Etats membres début mars 2024, la directive a été définitivement adoptée par les eurodéputés le 24 avril. Elle doit encore être formellement approuvée par les Vingt-Sept pour entrer en vigueur.
[9] https://www.europarl.europa.eu/factsheets/fr/sheet/53/le-fonds-social-europeen-plus-fse%2B-
[10] Plusieurs projets antérieurs ont été intégrés au FSE+, comme « Initiative pour l’emploi des jeunes (IEJ) », qui finance des projets pour les moins de 30 ans n’étant ni en emploi, ni en étude, ni en formation (NEET), le Fonds européen d’aide aux plus démunis (FEAD), etc.
[11] Avec le décaissement final (14 décembre 2022), l’UE a accordé 98,4 milliards d’euros de prêts dos à dos. Ce dernier versement a clôturé le dernier appel lancé par la Commission pour que les États membres expriment leur intérêt pour les prêts de la SURE en 2022. La disponibilité de l’instrument SURE s’est achevée le 31 décembre 2022.
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