LE DISCOURS OFFICIEL INTRODUIT UNE CONFUSION REGRETTABLE ENTRE LE PARRAINAGE POUR L’EMPLOI ET LE MENTORAT.
Le « parrainage pour l’emploi » existe depuis des décennies et obéit à un cahier des charges précis[1]. Il mobilise plus de 600 acteurs (dont les Missions locales, des associations dédiées, etc.)[2]. Ceux-ci mobilisent des dizaines de milliers de jeunes et de parrains bénévoles (actifs ou retraités) avec des réseaux bien implantés. Son objet est l’insertion professionnelle des jeunes.
« Avec le parrainage pour l’emploi, un(e) bénévole, professionnel en activité ou retraité(e), partage son expérience et/ou ses réseaux avec un(e) jeune en lui prodiguant une aide personnalisée dans le cadre de sa recherche d’emploi. » [3]
Pour mémoire, le Président de la République s’était engagé à développer le parrainage en 2017[4] ; Il avait alors annoncé un objectif de 100 000 jeunes parrainés sur le quinquennat.
Le « mentorat » est un dispositif plus récent qui vise aussi le soutien apporté à des jeunes par des intervenants bénévoles de nature très diverses. Mais dont le champ d’intervention concerne des sujets plus divers : éducation, parentalité, orientation et insertion professionnelle[5].
« Concrètement, il s’agit de faire bénéficier les jeunes de conseils professionnels d’un mentor. Ce dernier peut être un actif ou un retraité. Il accompagne des jeunes, parfois dès le début du collège, sur le moyen-long terme, en leur consacrant une à deux heures par mois. »
« La mesure s’adresse en priorité aux jeunes issus de quartiers défavorisés ou de zones rurales reculées. »
La mise en avant du terme de « mentorat » apparait principalement comme une opération de communication politique, de la part de la ministre du Travail, pour faire du neuf.
Ainsi le président de la République a pu annoncer un « nouveau dispositif » à destination des jeunes : « 1 jeune 1 mentor »[6].
LE GOUVERNEMENT VIENT D’ANNONCER UNE MONTÉE EN PUISSANCE DU « MENTORAT », DANS LE CADRE DU PLAN JEUNES[7].
L’objectif évoqué serait de 100 000 jeunes « mentorés » en 2021, contre 25 000 en 2020 (puis 200 000 en 2022).
Il est question de financer des associations spécialisées comme l’AFEV (Association de la fondation étudiante pour la ville), Article 1, Chemins d’avenir, Entraide scolaire amicale, NQT, Proxité, Socrate, Télémaque, etc. En décembre 2020, ces huit associations ont décidé de mettre en commun leur énergie pour développer le mentorat en France en créant le « Collectif Mentorat ».
Ainsi, par exemple, sur un an, l’AFEV espère passer de 18 000 à 40 000 le nombre de ses mentors. Mais, l’AFEV, qui fait depuis de nombreuses années un excellent travail, n’aborde pas le champ de l’insertion professionnelle. Elle mobilise des étudiants pour apporter un soutien à des collégiens, des lycéens, voire de nouveaux étudiants.
Je choisis de ne pas aborder l’engagement de certaines grandes entreprises en matière de communication dans le cadre de ce billet, car ce sujet mérite d’être détaillé !
LE BUDGET ANNONCE PARAIT FAIBLE PAR RAPPORT A L’OBJECTIF DE 100 000 BINÔMES.
Un budget de 30 millions d’euros devrait s’ajouter en 2021 à une enveloppe annuelle de 10 millions d’euros. Pour un budget global de 40 millions, la subvention par jeune serait de 400 €, alors que le coût est estimé dans une fourchette de 500 à 1 200 €.
Un travail important est nécessaire tant vis-à-vis des jeunes (identifier, convaincre suivre, mesurer la satisfaction) que vis-à-vis des « mentors » (formation, soutien, suivi, satisfaction) et, enfin, la mise en relation.
On se trouve face à la reprise de dispositifs existants avec une attribution budgétaire a priori insuffisante.
[1] « Le parrainage permet de renforcer l’égalité des chances en matière d’insertion professionnelle et vise à lutter contre toutes formes de discrimination. Le 18 juillet 2018, lors de son intervention sur la politique de la ville, le Président de la République a réaffirmé le rôle du parrainage comme levier pour l’insertion professionnelle des jeunes, en renforçant l’accès au monde de l’entreprise. » – 07/01/21
[2] « Plus de 600 structures œuvrent pour le parrainage pour l’emploi des jeunes : les missions locales, les organismes travaillant avec des jeunes sur leur insertion professionnelle : associations de prévention, centres sociaux, etc. et des associations dédiées au parrainage et à l’accompagnement des jeunes comme l’association NQT ainsi que des associations d’entreprises : Clubs régionaux d’entreprises partenaires de l’insertion (CREPI), clubs de la Fondation Agir contre l’Exclusion (FACE), etc. »
[3] https://travail-emploi.gouv.fr/emploi/mesures-jeunes/parrainage-emploi/article/le-parrainage-pour-l-emploi-c-est-quoi
[4] Discours de Tourcoing (Nord) du Président de la République sur la politique de la ville – Novembre 2017.
[5] Site des opérateurs du mentorat : https://www.lementorat.fr/le-mentorat/
[6] « Le mentorat, un levier essentiel pour les jeunes » – France Relance – Emploi et Travail – 01/03/2021
[7] Le président de la République, la ministre du Travail et la secrétaire d’Etat à la Jeunesse.
« Ce que je veux, c’est que chaque jeune qui en a besoin puisse avoir un mentor. Et aussi qu’on offre la possibilité à des cadres en entreprise, à des jeunes qui ont déjà une expérience, d’aider d’autres jeunes, de leur faire confiance, de les accompagner, de leur apporter leur propre exemple de vie. » – Emmanuel Macron.
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