LA « MOBILISATION POUR L’EMPLOI » S’ENGAGE
Le Premier ministre vient d’adresser aux préfets une circulaire[1] pour leur demander de convoquer, sous dix jours, les « acteurs pertinents » de leurs territoires pour répondre à la mobilisation pour l’emploi annoncée[2] par Emmanuel Macron[3]. Cette circulaire exige des résultats « tangibles » concernant cette mobilisation pour l’emploi.
L’objectif serait de tenter de :
« remédier aux angles morts de nos politiques publiques, c’est-à-dire aux situations où celles-ci n’atteignent pas leurs objectifs, faute de suivi politique ou de coordination au plus près des territoires ».
La liste, avancée par le Président, concerne principalement l’apprentissage, les offres d’emploi non pourvues et les moyens de faciliter le retour à l’emploi[4]. Ces points sont repris par la circulaire avec le rappel de mesures déjà adoptées et des pistes.
POUR L’APPRENTISSAGE,
Il s’agit de s’assurer que tous les jeunes souhaitant débuter un apprentissage pourront trouver un employeur et un contrat d’apprentissage, ce qui n’est pas toujours le cas. Le problème inverse, celui des postes d’apprentis non pourvus n’est pas évoqué.
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Une amélioration de la mise en relation entre les jeunes et les entreprises est visée. La « mobilisation des élus locaux sur les problèmes de mise en relation entre les apprentis et les entreprises» apparait un peu surréaliste, mais pourquoi pas ne pas rêver ?
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La mise en œuvre du « bail mobilité » de 1 à 10 mois, déjà adopté[5], est rappelée. La mise en pratique du bail mobilité reste à réaliser sachant qu’il ne saurait intéresser l’ensemble des bailleurs privés ou sociaux.
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Trouver d’autres opportunités de logement d’une durée limitée. Il serait envisagé de mobiliser, pendant certaines périodes des logements[6], de favoriser la colocation[7] et la cohabitation intergénérationnelle ou bien d’installer des résidences jeunes dans le parc social « qui permettent d’attribuer majoritairement à des personnes de moins de trente ans les logements d’un programme de logements sociaux agréé à cet effet»[8].
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Une amélioration de l’« offre régionale de transport collectif » est souhaitée…
POUR LES EMPLOIS NON POURVUS :
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Il est question de la réorganiser les services de Pôle emploi. Ceci est actuellement l’objet d’une négociation entre l’État, l’Unédic et les partenaires sociaux. On ignore encore les résultats de cette réflexion nationale.
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Les Pactes régionaux d’Investissements dans les Compétences (PRIC), pilotés par le ministère du Travail, sont déjà presque tous signés. Il reste à les mettre en œuvre pour atteindre les objectifs dans la durée.
POUR FACILITER LE RETOUR À L’EMPLOI
Les mesures concernent deux points : les places en garderie et la mobilité des chercheurs d’emploi.
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Mise en place une offre de garderie « ponctuelle» qui permettrait aux parents de faire garder leurs enfants pendant un entretien d’embauche ou durant une période d’essai.
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Réserver des places en crèches pour les cas de reprise durable d’un emploi[9] en mobilisant les aides financières existantes.
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De nouvelles aides au permis de conduire pour les chômeurs et des locations à prix bas d’automobiles.
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Des aides au déménagement avec une amélioration des dispositifs déjà existants comme la prime de 1 000 euros pour les déménagements et l’instauration d’une aide à la mobilité le temps de la période d’essai, de façon à n’enclencher le déménagement qu’une fois cette période terminée.
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L’accès à des logements: offres d’Action logement et création d’organismes pour faciliter la sous-location de logements sociaux « qui seraient attribués à des apprentis ou des actifs en mobilité ».
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Les demandes faites aux Préfets par le Premier ministre laissent rêveur dans la mesure où, si elles apparaissent logiques sur le fond, elles correspondent :
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Soit à des mesures existantes (aide au déménagement) ou en cours de mise en place (bail mobilité) et
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Soit à de véritables « missions impossibles » pour les acteurs locaux sollicités.
Enfin, la plupart d’entre elles correspondent à des dépenses qui doivent être budgétées et adoptées par les collectivités locales concernées. Elles hériteront de cette charge financière…
Pour donner quelques exemples :
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Les élus locaux auront bien du mal à trouver des places d’apprentis dans une spécialité professionnelle donnée dans leur commune, si les établissements ou les CFA n’y parviennent pas !
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L’accès à une place en crèche donne actuellement lieu à file d’attente, dans la plupart des cas. La priorité à accorder de la sorte apparait difficile et ne peut être qu’exceptionnelle. Des opportunités de garde ponctuelle existant déjà dans de nombreux cas.
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Les logements temporaires dans les parcs sociaux sont une excellente idée, mais les projets déjà menés avec des colocations montrent combien il est difficile de les concrétiser.
Le projet de « mobilisation pour l’emploi », quand on le détaille, semble trouver sa raison dans le calendrier électoral plus que dans une démarche significative. Reste à espérer que les réunions permettront de faire émerger d’autres idées.
[1] Cette circulaire aux préfets fixe un calendrier, les objectifs à remplir et transmet des fiches pratiques.
[2] La « mobilisation nationale et territoriale autour de la formation, l’emploi, et des grandes transitions écologique et numérique ».
[3] « La véritable politique de retour au pouvoir d’achat, c’est le retour au plein emploi. Et pour cela, il faut faire la transformation du pays. »
[4] D’autres mesures concernent indirectement l’emploi : réindustrialisation, transition climatique et rénovation thermique des bâtiments.
[5] Le bail mobilité a été créé lors de l’adoption de la loi ELAN du 23 novembre 2018, modifiant la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 qui régit les baux d’habitations classiques. Il concerne explicitement les apprentis. https://www.service-public.fr/particuliers/actualites/A13079
[6] Résidences secondaires, logements touristiques ou logements étudiants.
[7] La loi Molle du 25 mars 2009 permet aux étudiants, aux jeunes en alternance et aux moins de 30 ans de pouvoir vivre en colocation dans le parc locatif social.
[8] Consulter le site : https://www.rdvle.com/
[9] Les solutions existantes (garde ponctuelle, Paje…) sont « insuffisantes » reconnait le Premier ministre. Certains renoncent à un emploi faute d’avoir trouvé à temps une solution de garde.
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